La voix de Depeche Mode, après une tournée triomphale du groupe, confirme son talent en solo avec un deuxième album plus électronique: Hourglass. D-Side et le duo techno new-yorkais K10K vous offrent une version martiale et percutante de "Kingdom", single aux envolées belles à pleurer.
par Jean-François Micard
Le titre de ton nouvel album, Hourglass, semble suggérer que le temps est un problème important à tes yeux désormais...
Dave Gahan: Je pense qu'il a toujours été important, mais que je suis aujourd'hui davantage conscient de mon besoin de m'ancrer dans le présent, plutôt que de me complaire dans le passé ou de m'inquiéter à propos de l'avenir. J'ai besoin de me poser, et de savourer le moment présent. Les choses vont très bien pour moi en ce moment, j'ai une famille fantastique, j'adore le fait de vivre à New York... Je suis bien. Hourglass a été enregistré chez moi, dans mon propre studio, qui n'est rien d'autre qu'une petite piéce dans l'appartement, et c'était agreéable et confortable d'y enregistrer. Mais il est évident que je vieillis. J'ai quarante-cinq ans et je ne réagis plus de la même manière par rapport aux choses qui m'entourent.
Est-ce que le fait que tu as écrit plusieurs chansons sur le dernier album de Depeche Mode a facilité l'écriture de ton nouvel album solo?
Oui, je pense. Ecrire pour Depeche Mode a été très libérateur et en commençant Hourglass, je n'avais pas ce sentiment d'avoir quelque chose à prouver à qui que ce soit. Lorsque nous avons commencé à écrire et à enregistrer pour cet album, je ne savais même pas encore quelle serait la destination de ces morceaux, mais ça n'avait aucune importance. Peut-être que certains titres iraient à Depeche Mode, d'autres pour un album solo, c'était juste un ensemble de choses réalisees pendant une période donnée. J'ai nettement pris confiance en moi, en mon écriture, et ma confiance en Christian et Andrew, en tant que partenaires musicaux, a également grandi. Nous sommes entrés dans une relation de travail très agréable et très productive.
Christian Eigner (ndlr: batteur) et Andrew Phillpott (ndlr: programmation) sont tous les deux membres de Depeche Mode en live. Est-ce la raison pour laquelle tu as choisi de travailler avec eux?
Ce sont plutôt eux qui m'ont choisi, à moins que ce soit l'album qui nous ait choisis tous les trois (rires). Mais c'est vrai que toutes ces années passées à jouer sur scène avec Christian, à l'écouter mettre en place cette sorte d'épine dorsale rythmique derrière moi, nous ont amenés à avoir des rapports de confiance et d'amitié, tout comme c'est le cas pour Andrew, qui fait partie de la famille Depeche Mode depuis au moins quinze ans. En tous les cas, cela m'a semblé bien plus naturel de travailler avec eux que ce que j'avais fait pour Paper Monsters, où j'avais délibérément cherché à m'éloigner le plus possible de Depeche Mode et à travailler avec quelqu'un qui n'appartenait pas du tout à ma famille musicale. Je pense que, à l'époque, j'avais pris cette décision car Depeche Mode et tout ce qui nous entourait ne constituaient plus une inspiration pour moi, je ne m'y sentais pas vraiment à ma place. Je croyais vraiment en avoir fini avec le groupe, et c'est finalement le contraire qui s'est passé. Enregistrer Paper Monsters m'a poussé à vouloir m'impliquer davantage dans le processus de création de Depeche Mode en proposant mes propres chansons. Le fait de retravailler sur mes propres ébauches avec Martin dans le studio a eu sur moi un effet très cathartique. Je n'avais donc plus besoin de m'échapper de Depeche Mode au point où je l'avais fait avec Paper Monsters.
Est-ce que certains titres d'Hourglass tirent leur origine de chansons que tu aurals proposees a Martin pour Playing the Angel et qui n'auraient pas ete retenues pour l'album?
Non. Lorsque nous avons commencé, il y avait quelques chansons de cette époque que je pensais revisiter et modifier pour Hourglass, mais cela ne s'est finalement pas fait. Tous les titres d'Hourglass ont été écrits, enregistrés et produits par nous trois durant le temps que nous avons passé ensemble. Ce ne sont que des nouvelles chansons.
Qu'est-ce qui t'a poussé à préférer produire l'album toi-même avec Christian et Andrew plutôt que de faire appel à un producteur extérieur?
Ce n'était pas prémédité, ça c'est tout simplement fait comme ça. Daniel Miller, de Mute, est venu écouter quelques titres dans le studio après environ trois semaines de travail, et il a été vraiment enthousiasmé par ce que nous lui avons présenté. Il a dit: «J'ai l'impression que vous êtes en train de produire l'album vous-mêmes» et nous n'avons pu qu'acquiescer, même si ce n'était pas vraiment prévu au départ. En tout et pour tout, l'album a été enregistré, et produit, sur une très courte période de temps, puisqu'il ne nous a fallu que huit semaines.
La tonalité générale d'Hourglass est bien plus électronique que celle de Paper Monsters. Souhaitais-tu délibérément t'éloigner de ce son plus rock pour revenir à tes racines?
Pour moi, l'instrumentation n'est pas particulièrement importante. C'est comme ça pour cet album, ça peut être l'inverse pour le prochain. Avec Paper Monsters, j'avais consciemment pris la décision de travailler davantage avec des instruments et des musiciens live, d'avoir un ensemble plus organique et immédiat. Je cherchais avant tout une autre façon de travailler que celle que j'avais connue depuis des années. Hourglass est en fait une sorte de grande combinaison de tout ça, de batteries, de basses et de guitares réellement jouées et manipulées ultérieurement par l'informatique, ce qui est un processus très proche de celui que nous utilisons pour Depeche Mode. Mais ce n'est pas quelque chose à quoi nous avons pensé, nous n'avons même pas réalisé que c'était le cas, jusqu'à ce que des gens de l'extérieur entendent nos titres et nous disent qu'ils sonnaient plus électroniques. Pour moi, ce qui importe avant tout ce sont le son et l'atmosphère créés par la musique, quels que soient les instruments utilisés pour la composer. Je ne me pose pas pour dire: «Bon, je vais faire un album électronique ». Je le fais pour dire: «Je veux faire un album de chansons que j'aimerais écouter».
Alors que les textes de Paper Monsters apparaissaient cyniques et ironiques, ceux d'Hourglass sembient bien plus sincères et intimes. As-tu décidé de nous présenter le "vrai" Dave Gahan cette fois-ci?
Oui, je pense. Je suis nettement plus serein par rapport à qui je suis et à ce que je suis, par rapport à mes sentiments, et je suis capable d'exprimer toutes ces choses dont j'aurais été incapable auparavant. Je pense que cela se ressent jusqu'aux mélodies de chant, jusqu'à la façon dont j'ai structuré les morceaux. J'ai passé nettement plus de temps à travailler sur ces textes, pour qu'ils experiment réellement ce que je voulais, ce que je suis.
Un titre comme "Use You" est très pessimiste. Exprime-t-il ton sentiment vis-à-vis des relations humaines?
Je ne pense pas qu'il soit autant pessimiste qu'égotiste (rires). C'est une chanson sur le contrôle, sur le fait de vouloir contrôler même les gens qui t'entourent, d'utiliser les gens comme tu peux avoir recours aux drogues ou à l'alcool pour te sentir mieux. Mais en définitive, tout ce que cela t'apporte, en tout cas ce que cela m'a apporté, c'est de me retrouver tout seul. Ce morceau exprime surtout ce dégoût de cette partie de moi qui ressort de temps à autre lorsque je cherche à utiliser les gens pour aller jusqu'où je pense que je veux aller, ce qui me place souvent dans les pires ennuis. J'ai le sentiment que cet album exprime toutes les différentes facettes de ma personnalité et que j'ai été amené à découvrir, à travers ces chansons, au fur et à mesure que je les écrivais, que certaines de ces facettes sont franchement peu séduisantes (rires).
Sur "Miracles", tu confesses ton manque de foi qui rappelle beaucoup des choses qu'a pu écrire Martin pour Depeche Mode. Est-ce qu'il t'a influencé pour un titre comme celui-ci?
Je crois que Martin et moi nous nous sentons tous deux, d'une manière très différente, connectés au monde spirituel. Nous croyons qu'il y a une signification ultime, supérieure, à la vie humaine, mais nous nous interrogeons tous deux sur les religions organisées et les politiques qui vont avec, se basant sur des textes qui ont été réécrits maintes et maintes fois, et déformés un peu plus à chaque fois. C'est difficile pour moi d'avoir la foi dans une quelconque religion, mais j'ai en revanche une foi profonde en la vie.
Le single "Kingdom" a été publié en ligne plus de deux mois avant sa sortie physique en EP. Quelles sont les raisons d'une telle décision?
Pour être honnête, je n'en sais strictement rien (rires). Les labels aujourd'hui sont très concernés par les sorties en ligne, par le fait d'avoir des titres disponibles sur Internet, pour occuper et préparer le terrain je pense. Mais je n'étais même pas au courant qu'ils l'avaient fait pour mon single (rires), c'est te dire à quel point je suis attentivement ce genre de détails. A mon avis, les majors ont enfin commencé à comprendre l'usage qui pouvait être fait de la technologie, et elles en font sans doute un peu trop dans ce domaine. Mais ce single, comme les suivants, sort également en véritable CD et vinyle, avec un assortiment de remixes choisis avec soin (rires).
Il y a également une édition limitée d'Hourglass avec un DVD...
Oui, le DVD comprend cinq titres que nous avons réenregistrés de manière acoustique dans mon studio à New York. Nous avons passé une journée à faire ces nouvelles versions. Il y a également une longue interview et pas mal de choses filmées dans le studio. J'apprécie d'avoir pu sortir Hourglass avec ce bonus dans la mesure où, récemment, nous avons réédité les anciens albums de Depeche Mode, et que ce que j'ai trouvé de plus intéressant dans ces sorties étaient les reportages vidéos figurant sur les DVDs. C'était comme de consulter mon journal, avec toutes ces différentes periodes de ma vie (rires).
Tu considères donc le DVD d'Hourglass comme la suite logique de ceux des albums remasterisés?
Non, pas vraiment, c'est assez différent en fait. Tu as des éléments similaires, comme les passages filmés en studio, mais il y a aussi d'autres choses. Et puis, évidemment, l'aspect historique est absent... C'est vraiment juste un témoignage d'un instant, d'un album...rien de plus.
Au moment de la sortie de Paper Monsters, il y avait énormément d'amertume au sein de Depeche Mode, au point que l'on ne savait pas si le groupe allait continuer. Aujourd'hui, quels sont tes rapports avec Martin Gore et Andrew Fletcher?
Eh bien, nous avons continué (rires). Nous avons enregistré ensemble un album qui s'est révélé très agréable à faire, nous avons tourné pendant près d'un an et je pense que c'était l'une des meilleures tournées que nous ayons faites. J'ai reçu il y a quelques jours en e-mail de Martin car il venait juste d'écouter Hourglass. Il m'a écrit qu'il aimait l'album, ce qui m'a déjà fait plaisir, et il m'a également dit de dire aux journalistes que, pour lui, c'est son album de l'année (rires). Je pense que c'est sa façon de dire à tout le monde de laisser le groupe, et nos carrières respectives, en paix.
Quand pensez-vous vous remettre à travailler sur un nouvel album de Depeche Mode?
Je sais que Martin est en train d'écrire des choses de son côté, Christian, Andrew et moi avons prévu de composer quelques chansons d'ici la fin de l'année, et nous nous verrons probablement l'an prochain avec Martin pour en parler, nous faire écouter nos démos respectives et voir ce que nous allons en faire. Mais il n'y a pas encore de plan définitif avec une date de sortie déjà prévue.
Mais tu penses tout de même t'impliquer d'un point de vue créatif en écrivant quelques titres?
Oui, dans la mesure où j'ai des chansons que je pense que notre public aura envie d'entendre, je le ferai certainement.
Tu as une fois encore fait appel à Anton Corbijn pour la pochette d'Hourglass et tes nouvelles photos. Penses-tu qu'il soit l'artiste le plus à même de te représenter?
Oui. Je pense qu'il fait toujours un excellent travail, attachant beaucoup d'importance à ce que la musique cherche à évoquer, avant d'y ajouter ses propres idées, ce qui rend chacun de ses travaux à la fois très personnel et adapté à l'artiste qu'il illustre. Nous avons passé beaucoup de temps sur le visuel de cet album. Non seulement la pochette proprement dite, mais également les photos du livret, la manière dont les textes sont présentés, et je pense que le résultat en valait la peine.
Qu'as-tu pensé de son premier film sorti récemment, Control, consacré à la vie de Ian Curtis, défunt chanteur de Joy Division?
Je l'ai trouvé très bon. Tout d'abord, c'est indubitablement un film d'Anton, et chaque image est signée de sa patte. Mais ce qui est sans doute le plus important, c'est qu'il a échappé à l'écueil du biopic et du film rock pour en faire une histoire universelle autour de la love story de lan, de sa femme et de sa maîtresse. C'est un film très triste, et en même temps très dynamique. Anton est en réalisateur très doué.
Ta propre vie pourrait fort bien faire l'objet d'un biopic. On y trouve quantité d'éléments forts: les origines modestes, la célébrité précoce, la drogue, la rédemption...
(Rires) Quelle horreur... Non, si possible, je préférerais éviter que quelqu'un fasse un jour un film sur moi ou sur Depeche Mode. Je ne pense pas que ma vie soit si intéressante que cela...
As-tu prévu de tourner pour Hourglass comme tu l'avais fait pour Paper Monsters?
Il n'y a encore rien de prévu en ce sens. Nous en parlons entre nous, mais rien n'est encore décidé. Si nous faisons des concerts, ce sera vraisemblablement de courts ensembles de dates plutôt qu'une vraie tournée. Je sors d'une très longue tournée avec Depeche Mode, et je ne veux pas me relancer dans quelque chose d'aussi accaparant.
La différence est tout de même que, en solo, tu joues dans des salles plus petites et plus intimes. Est-ce un contexte que tu préfères?
C'est différent, mais j'aime les deux. J'ai adoré la tournée de Paper Monsters parce qu'elle m'a permis de jouer dans des lieux très différents, des petits clubs, des salles de taille moyenne et même quelques stades, dans différents endroits du monde. Cela donnait de mon point de vue des performances plus excitantes, plus intenses. Mais j'ai de plus en plus tendance à penser que, finalement, la taille du lieu importe assez peu car je me donne tout autant à chaque concert.
Penses-tu recourir de nouveau au répertoire de Depeche Mode comme tu l'avais fait pour la précédente tournée?
Oui, bien sûr, je jouerai plusieurs titres de Depeche Mode, à commencer par ceux que j'ai écrit pour Playing the Angel, mais aussi quelques morceaux plus anciens écrits par Martin, qui ne voit aucune objection à ce que je les reprenne en live. Mais j'ai desormais un répertoire personnel plus important et plus établi, ce qui fait que la part de mes concerts constituée de titres de Depeche Mode risque de se réduire au profit de mes propres titres.
Ecrit dans l'amertume et la frustration, Paper Monsters était, pour Dave Gahan, un moyen d'échapper à Depeche Mode, à son rôle de simple chanteur "objet" d'un compositeur démiurge. Et pour s'en éloigner le plus possible, c'était vers le rock et le blues que tendait alors Gahan, bien décidé à évacuer l'électronique du paysage. Mais les années ont passé depuis et Playing the Angel et la tournée qui a suivi ont permis de ressouder les liens au sein de Depeche Mode, de redéfinir les rôles et de laisser à Dave Gahan la liberté créatrice espérée. Rien d'étonant donc à ce que, dans ces circonstances, Hourglass, le second album solo de Dave Gahan, doive finalement plus à Depeche Mode qu'à son propre prédécesseur. Réconcilié avec sa famille musicale, Gahan s'est cette fois-ci entouré de Christian Eigner et Dave Philpott, tous deux membres additionnels de Depeche Mode en live, pour accoucher, chez lui et sans la moindre pression (puisqu'après tout, personne et même pas lui-même ne s'attendait aussi vite à un nouvel album solo), d'un opus nettement plus électronique, mais aussi nettement moins cynique. Car là où Paper Monsters tapait vicieusement sur les travers médiatiques de Dave Gahan (alcool, drogue, mégalomanie...), Hourglass est l'album bilan d'un homme de quarante-cinq ans qui a traversé l'enfer et s'en est sorti pratiquement indemne, mais doit encore lutter continuellement contre ses propres démons et le passage du temps. Intime et réflexif, Hourglass n'en est pourtant pas pour autant un album apaisé, loin de là, et les très durs "Use You" et "Deeper + Deeper" le prouvent largement, puits de noirceur oppressants dans un disque qui aspire à la lumière ("Endless", "Saw something", "A little Lie"), voire à la sainteté ("Miracles"). Nettement plus riches que Paper Monsters, mais néanmoins toujours plus directs que les compositions de Martin Gore, les dix titres d'Hourglass saluent la (re)naissance d'un songwriter des plus doués ("Kingdom", single éternel) qui espérons-le, continuera à développer ce talent au sein de Depeche Mode autant qu'en solo. Enfin, cerise sur le gâteau, notons que l'edition limitée d'Hourglass offre en bonus un DVD bonus avec un long reportage et l'album entier en 5.1.
Jean-François Micard
English translation provided by Google Translate. Additional minor cleanup by me, with my notes in purple. I am not a French speaker, so if you find errors in this translation, please let me know.
The voice of Depeche Mode, after a triumphant tour of the group, confirms his solo talent with a more electronic second album: Hourglass. D-Side and the New York techno duo K10K offer you a martial and hard-hitting version of "Kingdom", single with soaring beautiful to cry.
by Jean-François Micard
The title of your new album, Hourglass, seems to suggest that time is an important issue for you now...
Dave Gahan: I think it's always been important, but now I'm more aware of my need to ground myself in the present, rather than reveling in the past or worrying about the past to come up. I need to settle down, and savor the present moment. Things are going really well for me right now, I have a fantastic family, I love living in New York...I'm fine. Hourglass was recorded at my home, in my own studio, which is nothing more than a small room in the apartment, and it was nice and comfortable to record there. But it is obvious that I am getting old. I'm forty-five and I don't react the same way to things around me anymore.
Did the fact that you wrote several songs on the last Depeche Mode album make it easier to write your new solo album?
I think yes. Writing for Depeche Mode has been very liberating and starting Hourglass didn't feel like I had anything to prove to anyone. When we started writing and recording for this album, I didn't even know what the destination of those tracks would be yet, but that didn't matter. Maybe some titles would go to Depeche Mode, others for a solo album, it was just a collection of things done during a certain period of time. I have definitely gained confidence in myself, in my writing, and my confidence in Christian and Andrew, as musical partners, has also grown. We have entered into a very pleasant and productive working relationship.
Christian Eigner (editor's note: drummer) and Andrew Philpott (editor's note: programming) are both members of Depeche Mode live. Is this the reason why you chose to work with them?
They are the ones who chose me, unless it was the album that chose all three of us (laughs). But it's true that all these years spent playing on stage with Christian, listening to him put in place this sort of rhythmic backbone behind me, led us to have relationships of trust and friendship, just like this is the case for Andrew, who has been part of the Depeche Mode family for at least fifteen years. In any case, it seemed much more natural to me to work with them than what I had done for Paper Monsters, where I had deliberately sought to get as far away from Depeche Mode as possible and to work with someone — one that did not belong at all to my musical family. I think at the time I made that decision because Depeche Mode and everything around us was no longer an inspiration to me, I didn't really feel like I belonged there. I really thought I was done with the band, and in the end the opposite happened. Recording Paper Monsters made me want to get more involved in the process of creating Depeche Mode by coming up with my own songs. Reworking my own sketches with Martin in the studio had a very cathartic effect on me. So I didn't need to escape Depeche Mode to the point where I did with Paper Monsters.
Do some Hourglass titles originate from songs that you offered to Martin for Playing the Angel and that would not have been retained for the album?
No. When we first started there were a few songs from that era that I thought I would revisit and edit for Hourglass, but it ultimately didn't happen. All of Hourglass' tracks were written, recorded and produced by the three of us during our time together. These are just new songs.
What made you prefer to produce the album yourself with Christian and Andrew rather than hire an outside producer?
It was not premeditated, it is quite simply done like that. Daniel Miller from Mute came over to listen to a few songs in the studio after about three weeks of work, and he was really excited about what we presented to him. He said, "I feel like you're producing the album yourself" and we could only nod, although it wasn't really planned at the start. All in all, the album was recorded, and produced, in a very short period of time, since it only took us eight weeks.
The general tone of Hourglass is much more electronic than that of Paper Monsters. Did you deliberately want to move away from this more rock sound and go back to your roots?
For me, the instrumentation is not particularly important. It's like that for this album, it could be the reverse for the next one. With Paper Monsters, I had consciously made the decision to work more with live instruments and musicians, to have a more organic and immediate ensemble. Above all, I was looking for another way of working than the one I had known for years. Hourglass is actually kind of a great combination of all of that, drums and basses and guitars actually played and further manipulated by the computer, which is a very similar process to what we use for Depeche Mode. But that's not something we thought about, we didn't even realize it was, until people outside heard our tracks and told us they sounded more electronic. For me, what matters above all are the sound and atmosphere created by the music, regardless of the instruments used to compose it. I'm not asking myself to say: "Okay, I'm going to make an electronic album". I do it to say, "I want to make an album of songs that I would like to listen to."
While the texts of Paper Monsters seemed cynical and ironic, those of Hourglass seemed much more sincere and intimate. Did you decide to introduce us to the "real" Dave Gahan this time around?
I think yes. I am much more serene about who I am and what I am, about my feelings, and I am able to express all of those things that I would not have been able to before. I think it comes down to the vocals melodies, to the way I structured the songs. I spent a lot more time working on these texts, so that they really experience what I wanted, what I am.
A title like "Use You" is very pessimistic. Does it express your feeling for human relationships?
I don't think it's as pessimistic as it is egotistical (laughs). It's a song about control, about wanting to control even the people around you, about using people like you can use drugs or alcohol to make you feel better. But in the end, all it gives you, at least what it has given me, is to find myself all alone. This track mostly expresses that loathing for that part of me that comes out every now and then when I try to use people to get where I think I want to go, which often puts me in the worst trouble. I have the feeling that this album expresses all the different facets of my personality and that I was led to discover, through these songs, as I wrote them, that some of these facets are frankly not very attractive (laughs).
On "Miracles", you confess your lack of faith which recalls many of the things Martin wrote for Depeche Mode. Did he influence you for a title like this?
I believe that Martin and I both feel, in a very different way, connected to the spiritual world. We believe that there is an ultimate, higher, meaning in human life, but we both wonder about organized religions and the policies that go with them, based on texts that have been rewritten time and time again, and distorted a little more each time. It's hard for me to have faith in any religion, but I do have a deep faith in life.
The single "Kingdom" was released online more than two months before its physical EP release. What are the reasons for such a decision?
To be honest, I really don't know (laughs). The labels today are very concerned with online releases, by having tracks available on the Internet, to occupy and prepare the ground I think. But I was not even aware that they had done it for my single (laughs), which is to tell you how carefully I follow these kinds of details. In my opinion, the majors have finally started to understand the use that could be made of technology, and they are probably doing a little too much in this area. But this single, like the following ones, is also coming out on real CD and vinyl, with an assortment of carefully chosen remixes (laughs).
There is also a limited edition of Hourglass with a DVD...
Yes, the DVD includes five tracks that we re-recorded acoustically in my studio in New York. We spent a day making these new versions. There is also a long interview and quite a bit of stuff filmed in the studio. I appreciate that I was able to release Hourglass with this bonus as we recently re-released older Depeche Mode albums, and what I found most interesting about those releases were the video reports featured on those DVDs. It was like looking at my journal, with all these different periods of my life (laughs).
So you consider the Hourglass DVD as the logical continuation of those of the remastered albums?
No, not really, it's quite different actually. You have similar elements, like the passages filmed in the studio, but there are also other things. And then, obviously, the historical aspect is absent... It's really just a testimony of a moment, of an album...nothing more.
At the time of the release of Paper Monsters, there was a lot of bitterness within Depeche Mode, to the point that it was not known if the group would continue. Today, what is your relationship with Martin Gore and Andrew Fletcher?
Well, we continued (laughs). We recorded an album together which turned out to be very enjoyable to make, we toured for almost a year and I think it was one of the best tours we have done. I received an email from Martin a few days ago because he had just listened to Hourglass. He wrote to me that he liked the album, which made me happy already, and he also told me to tell reporters that, for him, it's his album of the year (laughs) . I think that's his way of telling everyone to leave the band, and our respective careers, in peace.
When do you expect to get back to work on a new Depeche Mode album?
I know Martin is writing stuff on his own, Christian, Andrew and I have plans to compose a few songs by the end of the year, and we'll probably see each other next year with Martin to talk, make us listen to our respective demos and see what we're going to do with them. But there is no definitive plan yet with a release date already scheduled.
But do you still think of getting involved from a creative point of view by writing a few tracks?
Yes, as long as I have songs that I think our audience will want to hear, I definitely will.
You once again called on Anton Corbijn for the Hourglass cover and your new photos. Do you think he is the artist best able to represent you?
Yes. I think he always does a great job, attaching a lot of importance to what the music seeks to evoke, before adding his own ideas to it, which makes each of his works both very personal and suitable for the artist that he illustrates. We spent a lot of time visualizing this album. Not only the cover art itself, but also the photos of the booklet, the way the texts are presented, and I think the result was worth it.
What did you think of his recently released first film, Control, devoted to the life of Ian Curtis, late singer of Joy Division?
I found it to be very good. First of all, this is undoubtedly an Anton film, and every image is signed with his signature. But what is undoubtedly the most important is that he escaped the pitfalls of biopic and rock film to make a universal story around the love story of Ian, his wife and his mistress. It's a very sad film, and at the same time very dynamic. Anton is a very talented director.
Your own life could very well be the subject of a biopic. There are many strong elements there: modest origins, precocious fame, drugs, redemption...
(Laughs) What a horror... No, if possible, I'd rather not have someone ever make a movie about me or Depeche Mode. I don't think my life is that interesting...
Do you plan to tour for Hourglass like you did for Paper Monsters?
There is still nothing planned in this direction. We are talking about it among ourselves, but nothing has been decided yet. If we do concerts, it will likely be short sets of dates rather than a real tour. I'm just coming off a really long tour with Depeche Mode, and I don't want to jump into something so overwhelming.
The difference is that, solo, you play in smaller and more intimate halls. Is this a context that you prefer?
It's different, but I like both. I loved the Paper Monsters tour because it allowed me to play in very different venues, small clubs, medium sized venues and even a few stadiums, in different places around the world. From my point of view, it gave more exciting, more intense performances. But I tend more and more to think that, in the end, the size of the place does not matter much because I give myself just as much at each concert.
Do you think you will use the Depeche Mode repertoire again as you did for the previous tour?
Yes, of course, I will play several Depeche Mode songs, starting with the ones I wrote for Playing the Angel, but also some older songs written by Martin, who has no objection to me doing them live again. But now I have a larger and more established personal repertoire, which means that the share of my concerts made up of Depeche Mode tracks may be reduced in favor of my own tracks.
Written in bitterness and frustration, Paper Monsters was, for Dave Gahan, a way to escape Depeche Mode, his role as a simple singer "object" of a demiurge composer (Purple: Put in another way, "interpreter of another person's lyrics", i.e., Martin Gore's). And to get away from it as much as possible, it was towards rock and blues that Gahan was aiming at, determined to remove electronics from the landscape. But the years have passed since then and Playing the Angel and the tour that followed helped to re-bond within Depeche Mode, redefine roles and give Dave Gahan the creative freedom he hoped for. No wonder then that, under these circumstances, Hourglass, Dave Gahan's second solo album, ultimately owes more to Depeche Mode than to its own predecessor. Reconciled with his musical family, Gahan this time surrounded himself with Christian Eigner and Dave Philpott [sic], both additional members of Depeche Mode live, to give birth, at home and without the slightest pressure (since after all, no one and not even he himself expected a new solo album so quickly), of a much more electronic opus, but also much less cynical. Because where Paper Monsters viciously tapped on Dave Gahan's publicized flaws (alcohol, drugs, megalomania...), Hourglass is the record album of a forty-five year old man who went through hell, got away with it, and came out virtually unscathed, but still has to continually grapple with his own demons and the passage of time. Intimate and reflective, Hourglass is nevertheless not a peaceful album, far from it, and the very hard "Use You" and "Deeper + Deeper" largely prove it, oppressive pits of darkness in a record that aspires to light ("Endless", "Saw something", "A little Lie"), even to holiness ("Miracles"). Much richer than Paper Monsters, but nevertheless always more direct than the compositions of Martin Gore, the ten tracks of Hourglass greet the (re)birth of a songwriter of the most gifted ("Kingdom", eternal single) who hopefully will continue to develop this talent within Depeche Mode as well as solo. Finally, the icing on the cake, let us note that the limited edition of Hourglass offers as a bonus a bonus DVD with a long report and the entire album in 5.1.
Jean-François Micard